lundi 12 décembre 2022

Suite pour une voix : 28112022



Bonsoir
Ah tiens il n’y a personne

bien sur à cette heure de la nuit
ils dorment et moi veillant

peu de moi à cette heure ci
beaucoup de fleurs dans les nuages
beaucoup d’esprits dans les boiseries
vous les entendez ? Non, il n’y a
personne, les pauvres devront se contenter
demain du récit de mes vigiles bonheurs

je veille, je contemple l’univers
je repose en silence dans notre salle vide
la pensée de mon couteau me fait sourire

mon cousin-frère m’a offert un laguiole
le bois de son manche est d’une marche
de la maison d’enfance
sa lame, un lièvre fugitif, tranche
l’écume entre les quartiers des citrons
et je sais : tout n’est pas symbole,
tout n’est pas mot, ni chiffre,
tout n’est pas succès ou échec

vite maintenant une pensée vite
vers l’abeille de mon laguiole
c’est fait
( une vite pensée acier abeille )

mais vous
vous entendez ?

le nom de mon cousin est Marc
notre père qui es sur terre
que ton nom soit déplacé
que ton désir se fasse
que l’espace nous vienne

que s’est il passé dans le rêve des hommes
pendant ces années où je veillais
debout dans la guérite invisible
… dérive au bord des jours
oh l’insoupçonnable douceur

ermite paysan, moi,
voué soit disant en faction
au service des puissants
en vérité j’écoute la joie du monde
mon cœur en son content

sortant j’ai constaté
je ne sais plus parler
n’oiseau brutal de leurs lèvres
noyées de neiges depuis loin retournées

désarticulées se sont leurs bouches
fracturés leurs vocables
comme les bois d’un jeune cerf traqué
tous se partagent la coupe vermeille
ouvragée de vieux ors des seconds et troisièmes sommeils

ils traquent en eux même les précieuses
paillettes des douleurs
plus que les aventuriers aux yeux rubis de convoitise
cherchant l’or en Californie il y a il parait
de la douleur de la douleur ! partageons ça !
amis
- quand dans la fable d’Homere,
le vieil Ulysse, lui, voilait son visage
pour qu’on ne le sache pas pleurant
au spectacle de ses propres malheurs
de ceux de ses amis, de ses jours disparus dans le sang

souche de souche de malheur

d’eux qu’est-il arrivé ?
j’ai rencontré une femme
dites est-ce pas étrange
qu’une femme, un être humain,
o tant pleinement humaine, elle !
tant s’évertue à faire cailler
son corps lui-même… en avatar ?

mais ma parole ! ils sont tous à l’envers !
maîtres spirituels c’est le nom
qui se donne aux maquereaux maintenant !

devenus ombres sans chair ils sont, ma parole !
et je ne le savais pas !
ce qu’ils nomment jouissance, vision, transe,
que sais je - ce sont les frémissements
des tourbillons de leurs ombres !
ils se veulent avatars, ma parole !

ont ils jamais vu ça :
quelqu’un qui ne cherche pas.
et pourtant ! je ne cherche pas.
tout simplement
bons yeux, bonnes oreilles
au bord du monde que nul soupçonne :

plein de désir et je ne manque pas
voilà qui les affole, affole…
alors ils cherchent, cherchent
la plaie motrice, le petit secret,
le bouton pour actionner…

moi, moi et mon corps organimental,
tout pareil à celui qui se dit
au premier commencement du poème

loin des péniches de Courson,
encore s’élançant du même lieu sans lieu

tu fais ceci tu fais cela, ma parole !
c’est ainsi en ma parole de haies,
de draps errants, de zieux mouillés d’amour
le chiens de la voisine,
et Oncle Heurté mambo, mambo !

et tous oiseaux vrissants, vombrissants,
apprend le nom qu’en secret ils lui donnent -
ma parole quand donc est elle ma parole ?

or sonne et je sonne l’alerte :
qu’il soit vide ou populeux, ce théâtre, qu’importe :
une question de vie ou de mort, c’est !
je crie : du corps, maintenant !
de la présence, tout de suite !
de la réalité ! de la réalité, d’urgence !

tu es, ma vie, semblable
à la lame de mon laguiole
au manche en bois de ma maison d’enfance
que m’a offert mon cousin qui vit
entre ses belles montagnes

mais pour qui ou pourquoi
ou comment cette femme quitterait
l’éternité des entres deux,
pourquoi renoncer à se dissoudre
avec les nébulats des airs

juste terrifiée … je crois bien
et associe justement il me semble
lumière et mourir,
réalisation et mourir
- maudits soient les grand voleurs célestes !

quelle tristesse ( elle
ne passe pas )
camelots du monde maquereau !
bonimenteurs aux sourires de beaux !

elle oubliera d’oubli inverse
les nus terribles et merveilleux
plus qu’amour demande
plus que la paume fileuse

Doux, doux, mon âme :
encore elles me blessent
ces pensées : par cela sache
distinguer en elles ce qui vient
du bon et qui est vrai
de la douleur d’où naît le faux
- je l’aimais bien sur et l’aime -
ce n’est faille ni honte !
mais puisqu’ainsi : vade retro !

rien n’y peut et n’y veut rien
tant que ce monde me tient -
et qu’il m’accueille

Bonne nuit pour aujourd’hui,
bon, constant théâtre
douces pluies !
je retourne au dodo.

( mg. opus 28112022, 2h7h )

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